lemonde-de-penelope

Les mots font des vagues

  • Vincent AMIEL
  • 2015

Il y a des mots que le flot des informations emporte… Doucement, marée après marée, jour après jour, comme le sable en allé. Des mots qui n’ont pas su résister, qui n’étaient pas assez nombreux, peut-être pas assez forts. Qui auraient dû être plus lourds et plus durs. Mais est-ce qu’un mot est jamais assez dur pour résister au flux, lui qui par nature y participe ? 

Pénélope a choisi de garder cette « nature » des mots, leur fluidité, leur répétition, leur amoncellement. Elle a gardé les colonnes, les ribambelles, les chapelets qui garnissent les pages de journaux, mais elle en a fait des vagues. Et puis des montagnes, et des volcans ; elle a transformé les mots en raz-de-marée, en tsunami. Elle les a tordus, enroulés, forcés, parce qu’ils n’avaient pas su tenir leur rôle, accomplir leur vocation. Ces mots qui devaient alerter, maintenir en alerte, susciter un branle-bas, peu à peu sont entrés dans l’ombre, ont disparu dans le continuum. Alors il a fallu s’occuper d’eux. 

Hébergement d'urgence, les femmes aussi, 2007, 81 x 100 cm
Hébergement d’urgence. Les femmes aussi - 2007 - 81 x 100 cm
Et accomplir ainsi tout à la fois un geste de poésie et un acte de dénonciation. Au sens propre du terme, Pénélope  trans-forme l’écriture, dépasse la calligraphie et donne à son matériau un autre aspect. Mélange de figures déjà-vues, de formes sarcastiques, de d’inquiétantes proliférations. L’élégance du cadre, des mouvements, n’empêche pas, en effet,  le sentiment d’une invasion inexorable, d’un envahissement. Comme si une force étrange avait pris possession de ces mots malgré eux, non pas contre eux, mais sans qu’ils s’en aperçoivent, et sans qu’ils puissent s’en défendre. Comme si l’abime (et les monstres marins avec elle) se nourrissait de leur insuffisance. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, au fond : ces ribambelles de lettres exhibent une faillite.

Si les mots se transforment en guirlandes, c’est qu’ils ont abandonné leur poste, qu’ils n’ont ni décrit, ni dénoncé, ni combattu comme il fallait. D’où le « mensonge » qui se cache habilement dans les lettres gothiques entourant l’un des collages. Ceux-ci montrent l’acte poétique comme une résistance ; comme un remodelage des formes qui ont perdu leur raison d’être.

Les oeuvres présentées ici manifestent, au-delà du 
Monde, au-delà des médias, la prise en compte des carences du discours, et la faiblesse intrinsèque de celui-ci par rapport à la puissance du pictural, de la mémoire des formes, de l’empreinte sensible, en définitive. 
Réchauffement climatique Hommage à van gogh, 2007, 89 x 116 cm
Réchauffement climatique. Hommage à Vincent van Gogh - 2007 - 89 x 116 cm

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